Et si nos 10% de chômage résultaient d’un choix démocratique !

Hier a été une journée très québécoise pour moi ; j’ai rencontré deux personnes qui revenaient du Canada, et qui m’ont dit respectivement :

  • que le taux de chômage y était très faible,
  • que se faire virer de son job pouvait prendre environ 2 mn,
  • que trouver un job était juste une affaire de jours.

Ceci m’a fait réfléchir sur nos intangibles et terrifiants  10% de chômage !

Le contexte :

Depuis que je suis tout petit, le taux de chômage en France est de l’ordre de 10% et, par delà les variations de conjoncture, et les politiques engagées par les uns et par les autres, ce taux ne varie pas significativement …  !!!

Et pourtant, tous les partis politiques, sans exception, clament vouloir faire baisser ce taux !

Sont-ils tous des incapables ? Ou les 10% résultent-ils d’un équilibre social, voulu par la vox populi, et dont la remise en cause ébranlerait fondamentalement d’autres fondements de notre « contrat social » ?

Les autres pays

Avant de discourir sur notre situation, regardons les taux de chômage dans d’autres pays :

Classons les différents cas :

  • les pays au taux bas de façon durable : Japon, Suisse, Australie, Corée du Sud, Mexique
  • les pays au taux bas qui souffrent de la crise : Etats Unis, Royaume Unis, Canada, Irlande,
  • les pays au taux élevé et stable : France,
  • Les pays au taux élevé qui souffrent de la crise :  Espagne, Italie, Portugal, Grèce
  • Les pays dont le taux de chômage baisse : Allemagne, Brésil

En clignant des yeux, on voit que, par delà les particularités socio-politiques de certains pays (Allemagne, Corée du Sud, Japon, Espagne …), il existe deux modèles type :

  • Le modèle libéral :
    • avec un taux de chômage typiquement de 4%,
    • avec une forte sensibilité à la conjoncture.
  • Le modèle social :
    • avec un taux de chômage en régime permanent de 8 à 10%,
    • avec une sensibilité moindre aux à-coups.

La différence entre les deux modèles :

Les deux modèles sont assez différents.

Comme chacun le sait bien le modèle libéral allie une certaine brutalité du marché de l’emploi (il est possible de se faire virer en 5 mn), avec une grande flexibilité dudit marché qui rend possible de trouver un job en une après midi.

A l’inverse, le modèle social protège le salarié … aux dépens du chômeur ; il est ainsi difficile pour l’employeur de rompre un contrat de travail, et très difficile pour le chômeur de trouver un emploi.

Et si les deux paramètres (facilité de rompre un contrat de travail, et facilité de trouver un emploi) étaient en fait liés !

Cette question enfonce une porte ouverte ! Tout le monde sait bien (ou sent bien) que là réside le noeud du problème : quel point d’équilibre entre :

  • la sécurité de l’emploi que réclament les salariés, mais qui génère un risque fort pour les employeurs, qui ne décideront d’embaucher que quand ils seront sûrs que le poste proposé est pérenne,
  • la facilité pour un demandeur d’emploi de trouver un poste

Les fausses réponses :

Un certain nombre de fausses réponses sont quelquefois avancées :

a) Il existe des pays où le taux de chômage est faible et où l’emploi à vie existe (le Japon !).

De fait, durant le miracle économique japonais, la plupart des salariés se vouaient corps et âme à leur entreprise, (parfois jusqu’au karoshi : mort subite de cadres ou d’employés de bureau par arrêt cardiaque suite à une charge de travail ou à un stress trop important) ; en contrepartie, les entreprises de grande taille  leur garantissaient un emploi à vie – mais attention ! pas nécessairement le même emploi à vie !

Par contre, cette garantie n’a jamais été donnée à la majorité des salariés, employés dans des plus petites entreprises

Après l’éclatement de la bulle japonaise en 1989, la crise de l’économie japonaise a fortement perturbé ce système et a vu émerger le phénomène des personnes âgées de 15 à 34 ans employées à temps partiel ou sans emploi stable.

b) Il suffit de créer plus de postes que de travailleurs, et le problème du chômage tombera de lui même.

Le fait que les 35 heures n’aient pas abaissé le taux de chômage est une démonstration de l’inefficacité de cette réponse.

La « meilleure » solution

Quelle est la meilleure solution, entre le modèle libéral et le modèle social ?

Il n’est pas simple de donner une réponse ! chaque modèle à ses avantages et ses perversions !

Le modèle libéral est très flexible, très économique et permet de mobiliser la population pour créer de la richesse – par contre il créée une classe de vrais pauvres, les inadaptés du système, qui vont occuper des postes extrêmement sous-payés, généralement jusqu’à un âge avancé.

Le modèle social, est plus confortable pour les salariés ; il freine un peu le développement économique et cantonne les inadaptés du système aux régimes de protection gérés par l’état (chômage, RSA …) – enfin, il encourage le travail « au noir ».

Un point d’équilibre qui dépend de l’organisation démocratique !

Plus déterminant, sont les mécanismes démocratiques des pays, qui emmènent, soit vers le modèle libéral, soit vers le modèle social !

Pour prendre un exemple, en France, la population se répartit en gros de la façon suivante :

  • 25% des français ont moins de 20 ans,
  • 50% des français ont un emploi,
  • 5% des français sont chômeurs,
  • 20% des français ont plus de 60 ans.

Comment pensez vous que vont voter les français s’ils ont le choix entre deux programmes politiques : un premier qui vise  à sécuriser les emplois, un second qui vise à rendre le marché de l’emploi plus fluide ?

Dans les pays anglo-saxons, la culture libérale, et la haine viscérale des impôts, agissent en sens inverse.

Conclusion

Il faut être clair dans sa tête et droit dans ses bottes : suivant le modèle retenu (libéral ou social) le taux de chômage sera de 4-5% ou 8-10% ; le reste n’est que dissertation sur le sexe des anges.

La vraie question est :

  • Préférons nous vraiment un modèle où l’état sécurise toujours plus les emplois, quitte à maintenir un taux de non-emploi élevé ?
  • Ne serait-il pas temps de se poser la question d’une lente évolution vers un modèle plus libéral ?

Je sais … on a essayé avec le CPE ; la rue a donné sa réponse !

Êtes vous très étonnés ?

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