Les primaires : est-ce bien malin ?

Depuis deux mandatures, le parti socialiste a recours à une primaire pour désigner son candidat.

L’UMP envisage de faire de même en 2017 …

Est-ce bien malin ?


Ce que nous observons

31 août 2014 : Toute la France assiste médusée au combat sanglant entre socialistes-de-gauche, socialistes-sociaux-démocrates et autre lieux lieux-découverts-à-marée-basse.

Le Président Hollande tente de calmer le jeu. Un article du Figaro relate quelques échanges :

Depuis Bruxelles, lors d’une conférence de presse à l’issue d’un sommet européen, François Hollande a affirmé son souhait «d’avoir un parti dans la majorité qui soit à l’unisson de ce que je propose ». « Cela n’empêche pas le débat, ça ne coupe pas la discussion, mais elle doit être menée à bien dans la perspective que j’ai définie», a-t-il affirmé. […]

Cette déclaration du chef de l’Etat qui se pose comme chef d’un parti dont il a été le secrétaire national a fait sursauter le président socialiste de la région Pays-de-la-Loire, Jacques Auxiette. « Cette formule sur un PS à l’unisson de la politique du chef de l’Etat est révélatrice d’une dérive quasiment monarchique des institutions », s’est-il agacé. « Il est a été élu par les Français qu’il représente désormais, avec une responsabilité particulière des socialistes qui l’ont porté au pouvoir. C’est lui qui devrait être à l’unisson du PS et pas l’inverse ».

Auxiette pointe « une dérive institutionnelle de l’homme providentiel qui se croit capable de tout, intervenant sur tout […] ».

La déclaration ci-dessus est révélatrice du changement profond qu’introduisent les primaires dans la façon de vivre nos institutions.

Si je pousse un peu le raisonnement (mais pas tellement !), dans l’esprit du PS, ce n’est pas François Hollande en personne qui a été élu Président de la République ! C’est le PS qui a été choisi, lequel a désigné François Hollande comme Président.

Du coup, si le Président a une position différente que celle du parti, cette trahison est présentée comme une dérive institutionnelle, un déni de démocratie.

J’en reste interdit …

Pourquoi avoir recours au mécanisme des primaires ?

Il est certain que, pour un grand parti, le mécanisme des primaires permet d’éviter les candidatures multiples, candidatures qui pourraient conduire à l’élimination de tous les candidats du parti alors qu’un seul aurait pu l’emporter.

J’ajoute, et c’est un effet pervers des mille et une lois qui régissent les temps d’antenne pour les candidats, que les primaires permettent d’alimenter le buzz médiatiques, sans consommer le crédit des partis en matière de temps de parole, ou les budgets de campagne … Ça compte.

Mais voyons les conséquences des primaires sur le choix des candidats : il est évident que le choix d’un candidat par les militants, fait intervenir des critères de choix qui ne sont peut être pas ceux des citoyens ordinaires. Choisir le meilleur militant ne veut pas dire choisir le meilleur candidat, ni même choisir le meilleur président.

De plus, dans les paris idéologiquement très larges (comme l’UMP ou le parti socialiste), l’homme qui fera consensus est probablement celui qui fâchera le moins les militants ; il risque donc d’être le plus mièvre, le plus ambigu, le plus « dans la synthèse ».

Vous conviendrez, sans que j’ai besoin de vous le détailler, que le choix de François Hollande par le parti socialiste est bien le résultat des principes édictés ci-dessus.

Pourquoi ne pas avoir recours au mécanisme des primaires ?

Rappelons nous tout d’abord que le recours aux primaires est récent : De Gaulle, Pompidou, Giscard, Mitterrand se sont présentés sans avoir été désignés formellement par leur parti … Étaient ce pour autant des mauvais candidats ? ou des mauvais présidents ?

Ce qui est sur, c’est qu’ils avaient su s’imposer à tous comme les meilleurs candidats potentiels, ce que les électeurs leur ont reconnu.

Par ailleurs, alors qu’aujourd’hui les grands partis se cabrent dans des postures idéologiques opposées, est-il bien malin de se priver de candidats qui proposent de gouverner en allant chercher les projets politiques  là où ils les considèrent bons ? C’est à dire, pourquoi pas, dans les programmes des différents partis politiques.

Comme vous le voyez, la liberté de se présenter devant les électeurs sans se prévaloir du vote préalable des militants d’un parti, peut être une richesse, et n’a jamais conduit à des catastrophes.

Ma conclusion personnelle

Les primaires s’imposent avec l’émergence de partis tentaculaires, rassemblant des mouvances disparates : quand les grandes échéances électorales approchent, chaque courant tente d’imposer sa façon de voir les choses, et pour ce qui concerne les présidentielles, tente d’imposer son candidat.

Pourquoi ne pas prendre acte de la multiplicité des courants politiques, et laisser chaque courant se déterminer.

Ce qui se passera alors, c’est que les mouvements évalueront leurs chances respectives : soit ils maintiendront leur candidat, soit ils négocieront avec les autres : « nous donnerons une consigne de vote en ta faveur si tu défends telle position, ou si tu nommes un premier ministre de chez nous … ! »

De toute façon, si de telles tractations ne devaient pas aboutir, pourquoi croyez vous que le choix imposé par des primaires va calmer le jeu ? Regardez ce qui se passe actuellement : les divergences politiques au sein du PS débordent et minent nos institutions ! Bravo !!!

Donc, à tout prendre, autant que les débats fratricides aient lieu avant.

L’élection de Président de la République doit se faire au suffrage universel, c’est à dire par tous les français ; ce n’est pas pour que les militants d’un parti fassent des choix préalables qui limitent ceux des citoyens.

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