La dictature médiatique

J’avoue que j’ai souvent pensé que la presse était majoritairement à gauche et relayait préférentiellement des informations colorées en ce sens.

Et puis, avec ce qui se passe en ce moment, j’ai un doute …


La presse ne serait pas neutre ?

Partisan de l’ex président Sarkozy, j’ai comme des millions de français, souffert des attaques qui étaient faites à l’encontre d’un homme qui avait, selon moi, vraiment envie de faire avancer le schmilblick.

Les attaques à ras de la ceinture et l’amplification perpétuelle du Fouquet’s, du yacht de Bolloré et de l’affaire Bettencourt m’ont souvent laissé penser que ceux qui relayaient ces messages avaient nécessairement une position partisane, et  que, comme ils n’allaient pas dans mon sens, ils étaient forcément de gauche.

Si cela avait été vrai, la presse aurait dû chanter victoire après le 6 mai 2012, et encenser le nouveau pouvoir !

Rien de tout çà : le nouveau président et son gouvernement ont été immédiatement soumis à la « planche à secousse » tout comme le président précédent.

Le mécanisme de la planche à secousses

De fait depuis l’arrivée de François Hollande, les médias, y compris la presse nettement marquée à gauche, ont viré casaque instantanément, et soumettent le Président Hollande et son équipe à une campagne de démolition en règle.

On appelle ça depuis des dizaines d’année « un lynchage médiatique ».

Voyez plutôt :

Sarkozy était bling-bling, agité, changeant, mégalo … Hollande est flou, mou-du-genou, menteur, benêt …

Que se passe-t-il donc ?

  • Les anti-Hollande diront que c’est tout simplement parce que notre président est flou, mou-du-genou, menteur et benêt …
  • mais moi, sincèrement je pense que même si je n’aime pas Hollande, il ne mérite pas plus ses qualificatifs que Sarkozy ne méritait les siens !

Alors ?

Alors quoi ? « Pourquoi tant de haine ? » (comme dirait Valeurs Actuelles), pourquoi la presse s’ingénie-t-elle a empêcher tous les gouvernements d’agir ? Pourquoi met-elle tant d’énergie à ridiculiser ceux qui exercent le pouvoir ?

A mon avis, le mot est lâché : « POUVOIR »

Le pouvoir médiatique

Regardons bien les évolutions de la démocratie depuis l’antiquité … L’idée est toujours la même : celui qui doit décider in fine doit être le peuple ! Maintenant par quel mécanisme le peuple s’exprime-t-il ?

A certaines périodes de notre histoire, l’équilibre était atteint par un subtil équilibre entre le clergé, la noblesse et la bourgeoisie,

Le modèle dominant aujourd’hui est celui de l’élection : le peuple désignant pour un temps limité ceux qui parlent en son nom,

Le communisme avait inauguré la dictature du prolétariat par laquelle :

  • le parti veut le bien du peuple,
  • donc quiconque est contre le parti est contre le peuple,
  • et en conséquence, quiconque n’est pas d’accord avec le parti est à éliminer.

Il n’est pas impossible que nous soyons en train d’assister, avec le développement des moyens de communication instantané, à l’émergence de la dictature médiatique qui pourrait se caractériser de la façon suivante :

  • les médias sont en contact permanent avec le peuple et savent ce qu’il pense,
  • les médias expriment donc la volonté du peuple,
  • quiconque cherche à parler plus fort que les médias doit être lynché.

Les médias :  l’oreille et la voix du peuple :

Il est vrai que les médias sont devenus grâce à Internet et aux sondages, une antenne permettant de capter avec une incroyable sensibilité, les tendances de l’opinion.

Leur « business model » et de capter ce que veut entendre le citoyen, pour lui resservir sous forme d’émissions radiophoniques, télévisuelles ou d’articles écrits, et générer ainsi de l’audience, et donc de la publicité.

L’audimat est donc devenu, paradoxalement, un instrument de mesure de ce que pense l’opinion ; qu’un débat télévisé soit très écouté, et il faudra en déduire que les questions abordées sont considérées comme essentielles par l’opinion.

Un média qui ne relaie que la sensibilité d’une infime minorité n’est pas écouté ; il n’a pas de budget de publicité, il ne peut pas se développer, il est voué à la disparition.

Finalement, la cabale contre Hollande n’est peut être  simplement, que le simple reflet de ce que pensent les français ; mais pourquoi auraient-ils changé d’avis si vite après l’élection ?

Une oreille sélective :

Le problème est que l’antenne médiatique est sélective : elle capte mieux certaines fréquences que d’autres !

Il faut reconnaître que parler de Mélanchon est plus amusant que de parler de Monsieur Carrez, homme politique au sérieux inébranlable, qui ne dit que des choses sensées, mais tellement ennuyeuses …

Donc les médias auront tendance à souligner le défaut, le scandale, le sensationnel plutôt que le sérieux, le raisonnable et l’équilibré.

Plus encore, le citoyen moyen aime se faire peur ; il appréciera sans l’avouer les messages terrifiants, porteurs d’angoisse, de peur, voire de haine ou de rejet.

Les médias ont tendance a ne pas faire le tri : nous sommes sous le régime du libéralisme des ondes où tout ce qui a du retentissement est relayé de façon indistincte ; l’objet est uniquement de maximiser l’audience, gage d’un ciblage parfait et de revenus publicitaires alléchants.

François Hollande, avec son « air normal », n’aurait-il pas cherché les ennuis ?

L’amplification et l’effet Larsen

Le miroir médiatique a la caractéristique d’amplifier les messages ; qu’une partie de l’opinion se mette à penser qu’Hollande est mou-du-genou, et immédiatement le tambour résonnera, invitant d’autres citoyens à  s’interroger, à se laisser convaincre, et à penser de même.

Le danger est que, par un effet bien connu des organisateurs de spectacles (l’effet Larsen), le bruit amplifié est re-capté par le microphone et vient se renforcer lui-même jusqu’à devenir un sifflement strident et assourdissant.

Là encore, ne serait-ce pas ce qui était arrivé à Nicolas Sarkozy et qui arrive en ce moment à François Hollande ?

L’autoprotection médiatique

Face à ces bruits assourdissants et imprévisibles, le politique essaie d’étouffer le niveau sonore en mettant la presse sous contrôle (par exemple en supprimant les revenus de la publicité comme avait voulu le faire N. Sarkozy pour les chaînes publiques).

Dans ce cas, la presse consciente de son pouvoir sur l’opinion, réagit à l’attaque ; elle a déjà inventé par le passé : la « liberté de la presse », « le secret des sources », principes affirmés péremptoirement, défendus bec et ongles, puis inscrits dans la loi (dans ce sens là, et non l’inverse !) ; elle invente aujourd’hui « le respect de la démocratie médiatique » (quand on dit que la presse dit des conneries) ou le « devoir d’information » (quand des informations sensibles sont divulguées illégalement).

Faut-il voir dans le tonnerre médiatique actuel une autoprotection renforcée envers un parti rompu à la dialectique et habitué à manier la caricature simplificatrice ? C’est possible …

Les méfaits de l’inflation ordurière

Enfin, un élément important propre à expliquer la tornade médiatique actuelle, est la forte dégradation de la qualité du discours politique.

Ne soyons pas des rêveurs, les noms d’oiseaux ne sont pas nouveaux dans la bouche des politiques … il faut néanmoins reconnaitre qu’ils fleurissent en rang particulièrement serrés en ce moment.

Or si les hommes et les femmes politiques, tous élus en général, ne se respectent pas entre eux, pourquoi le bon peuple, et donc la presse, les respecteraient-ils ?

De la même façon, les argumentaires politiques se simplifient ; les inexactitudes et les sophismes sont visibles à l’oeil nu ; certains politiques se croient même obligés d’utiliser un parlé grammaticalement appauvri, voire d’émailler leur discours de fautes de français savamment calculées.

Pourquoi ferions nous confiance à des politiques qui parlent comme des charretiers, raisonnent comme des savates, et s’ingénient à faire croire qu’ils sont au même niveau de réflexion stratégique que ma concierge ?

Du coup, puisque nous le pensons tout bas, la presse le dit tout haut … Ne nous étonnons pas !

Le rôle des lobbies

Les lobbies vivent en symbiose avec les médias.

Leur rôle est d’élaborer des thèses à laquelle les citoyens vont pouvoir adhérer : le mariage pour tous, l’incapacité de la police, l’anti-racisme, la dépénalisation du cannabis, la lutte contre les OGM ou les gaz de schiste  … Mais aussi la compétitivité des entreprises, la sécurité sur la route, la dureté contre la récidive …

Si la thèse est porteuse, et quelque soit la quantité de supporters réels, la machine médiatique pourra la relayer, et les mécanismes de la dictature médiatique pourront aider à la mettre en place.

A quand la dictature médiatique ?

Mais au fait, quel est le point d’aboutissement de la dictature médiatique ?

Quand la dictature médiatique sera en place, le politique ne pourra plus avoir une « vision » ou un « objectif ».

Il ne pourra que suivre fidèlement les désirs de l’électorat, qui lui seront désignés par les médias.

Il deviendra un ainsi simple mandataire courant sur les lieux d’un accident de ski pour annoncer une loi limitant la vitesse sur les pistes, avant d’aller à la fête annuelle de Villejoie sur gambette, promettre le remboursement par la sécurité sociale des cours de danse de vos enfants.

Pardon ?

que dites vous ?

nous y sommes déjà ?

Ah bon … !

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