Disqualification – Exclusion

Quand j’étais jeune (il y a longtemps), des camarades avec qui j’essayais d’échanger sur les sujets politiques de l’époque, me traitaient de « fasciste » afin de clore la discussion.

C’était une des premières manifestations de la technique de « Disqualification-Exclusion » dont nous avons aujourd’hui de très nombreux exemples …

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Le constat

  • Si d’aventure vous suggérez dans la conversation que vous n’aimeriez pas que vos garçons soient « gays », vous êtes définitivement un homophobe,
  • Si vous parlez de l’évolution du climat de façon raisonnable, on vous regarde de travers et on vous assène que vous être climato-sceptique,
  • Si vous remarquez que beaucoup de femmes de votre quartier sont voilées, vous êtes un indécrottable islamophobe,
  • Si vous pensez que votre petite fille est jolie dans sa petite robe rose, vous êtes un affreux défenseur des stéréotypes du genre,
  • Si vous pensez qu’accélérer la fin de vie n’est pas toujours une bonne chose, vous êtes contre le droit de mourir dans la dignité,
  • Si vous trouvez que les écolos (en supposant qu’il n’y en ait qu’une seule sorte) exagèrent en étant contre le pétrole, l’atome, la déforestation, les voitures, le tour de France et les sapins de Noël, c’est que vous êtes juste un ennemi de la planète,
  • Si vous pensez que L.214 pousse un peu dans sa lutte contre les abattoirs, alors vous êtes contre les droits des animaux,
  • Si vous suggérez qu’il n’y a pas que les « violences faites aux femmes », mais qu’il peut arriver qu’il y ait aussi des « violences faites aux hommes » … Vous n’êtes qu’un abominable macho, mâle et blanc de surcroit, ce qui n’arrange pas votre cas,
  • Si vous trouvez que l’écriture inclusive est une « violence faite à la grammaire », vous êtes juste un pauvre con borné,
  • Si vous constatez que sur la ligne A du RER, la plupart de ceux qui sautent au dessus des barrières sont noirs, vous êtes clairement un raciste,
  • Si vous susurrez qu’en matière d’esclavage, il n’y a pas eu que l’esclavage nord-américain, mais un esclavage arabe et africain, alors vous niez le colonialisme et l’esclavagisme,
  • Si, dans l’exposé d’une thèse politique, vous prononcez le mot « nation », ou si vous émettez des réserves sur la mondialisation, vous êtes immédiatement classé dans les populistes,
  • Si vous pensez qu’il serait temps de contrôler notre immigration, pas de doute vous êtes d’extrême-droite, c’est à dire glauque, nauséabond et revanchard.

J’ajoute que cette dernière catégorie regroupe par définition toutes les autres, car il est bien connu que le facho d’extrême-droite est un mâle blanc homophobe, climato-sceptique, islamophobe, contre la théorie du genre, colonialiste, rétrograde, populiste et raciste.

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Les effets

Toutes ces catégories artificiellement créées n’ont d’autre but que de vous disqualifier sans débat, afin de vous interdire de donner votre avis.

Vous êtes alors exclu de toute discussion.

Et de fait, ça marche ! Toute personne qui souhaite aborder un de ces sujets tabou, devra commencer par une longue périphrase dans laquelle il va s’excuser par avance d’oser formuler une thèse « politiquement incorrecte » … Et crac, les défenseurs de la bonne pensée se réveilleront et enverront un tir de barrage qui va tuer le débat dans l’œuf.

Cette technique d’exclusion est particulièrement douloureuse pour les journalistes honnêtes qui se retrouvent ligotés dans le politiquement correct, avec le risque permanent de se faire clouer au pilori si jamais ils sortent des rails imposés.

Certains essaient de réagir et remettent la pensée au centre du débat (Valeurs actuelles, Pascal Praud, Fabrice Luchini, Eric Zemour, Michel Onfray, Natacha Polony, et quelques autres) …

… Mais la plupart des journalistes (les moins bons à mon avis) choisissent de se soumettre et reprennent aveuglément le mantra bien-pensant.

Du coup, je retrouve chez de nombreux amis des bribes de la pensée officielle, dépourvues du raisonnement qui conduit à ladite pensée ; si la discussion s’engage, et que j’avance un argument, alors l’ami en question se retrouve sans réponse et a recours à la technique de « disqualification-Exclusion » … c’est tellement facile

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En résumé

Si vous voulez pousser une idée (par exemple « pour la défense des carottes injustement martyrisées pendant la cuisson »), il faut commencer par créer le mantra :

Les partisans des carottes cuites sont des carottophobes

Puis, vous sautez sur toutes les occasions de pousser votre thèse, de préférence en citant des cas ponctuels, et en confondant simultanéité et causalité : l’histoire dramatique de la pauvre carotte qui a été ajoutée par erreur à une ratatouille loupée ; celle du papy qui est mort après avoir ingéré du bœuf bourguignon ; la détresse du pauvre cheval à qui on ne donne que des carottes cuites, et qui perd ses dents

Une fois la thèse bien établie, il ne reste plus qu’à dénoncer tous les carottophobes, et crucifier tout ceux qui tentent de revenir au réel, à savoir que la carotte n’est finalement qu’un simple légume, que chacun a bien le droit de manger comme il veut !

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Que faire ?

Pas grand chose, sinon apporter votre soutien à tous ceux qui tentent d’éclairer les débats par des raisonnements compréhensibles et raisonnables …

… que vous soyez d’accord avec eux ou pas n’est pas important ! L’essentiel est de réhabiliter le débat d’idées.

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